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Hervé DUBERTRAND
Hervé DUBERTRAND
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28 février 2008

Copies d'Agrégation

AGREGATION INTERNE E.P.S. Ecrit II note 15/20

(Composition)

SUJET : En quoi et comment l’acquisition de techniques contribue-t-elle à la formation de l’élève ? Vous justifierez vos choix en prenant des exemples chez des élèves du second degré.

 La roucoulette en handball est une technique consistant à donner un effet à la balle, afin que celle-ci puisse contourner le gardien de but après avoir touché le sol. Comme toute technique, que nous qualifierons de savoir-faire destiné à être efficace dans la réalisation d’ une tâche, elle fait appel aux ressources du sujet (cognitives, motrices, affectives, sociales et énergétiques), pour atteindre l'efficacité (marquer), en étant le plus efficient possible (moindre effort).

 L'enseignant d'éducation physique et sportive (E.P.S.), doit dans le cadre de ses missions ("Missions du Professeur 1997 Instruire Eduquer Former") former ses élèves, c'est-à-dire les préparer, selon les perspectives d'une didactique appelée "développementale" par FERNANDEZ Cours Préparation Agrégation 1991, à être compétent dans différents domaines.

 Il nous semble donc intéressant d'étudier si l'appropriation de techniques variées (au plan des ressources sollicitées et de leur combinaison) participe à cette préparation. La part accordée à la formation de l'élève, lors de ce processus d'acquisition devra s'envisager non seulement sur le plan théorique mais surtout sur le plan pratique au regard des mises en œuvre pour atteindre cette visée.

 Quelle formation doit être visée, en termes de pouvoirs moteurs certes, au regard des potentialités de l'élève et de leurs utilisations, mais aussi comment préparer l'élève à être autonome, responsable, solidaire, apte à assurer sa sécurité et celle des autres, pour être un citoyen acteur et critique des pratiques sociales (objectifs et finalités de l'E.P.S. en collèges et lycées : programmes 6ème BO A/08/96 et lycée BO HS n° 6 31/08/2001).

 Comment opérationnaliser ce projet de formation, au regard de l'activité de l'élève qui cherche à acquérir des produits, développer des processus et de celle du professeur dans la conception, la structuration et la dispense de son enseignement nécessitant l'adoption de stratégies idoines ?

 Quelles sont enfin les limites de l'utilisation d'un moyen non exclusif et les précautions qu'il induit au regard du métier d'enseignant si difficile de fait des contradictions à résoudre dans un groupe classe (MEARD 93 "un maximum pour chacun mais un minimum pour tous" Dossier EPS 61 LAMOTTE NERIN 2003).

 Nous tentons donc de montrer que si l'appropriation de savoirs faire variés, dans le respect d'une contextualisation, d'une adaptation et d'une régulation, participe à une formation partielle à visée motrice et utilitaire, c'est surtout grâce à une approche pédago didactique centrée sur les processus et l'organisation des groupes que l'enseignant pourra apporter sa quote part à une formation complète de l'élève.

 Pour cela, nous aborderons dans un premier temps les objectifs et les mises en œuvre de dispositifs didactiques sollicitant les ressources de l'élève simultanément ou plus spécifiquement. C'est dans la construction des tâches que nous rechercherons les sens donnés et que nous aborderons les modalités selon une approche cognitiviste à respecter.

 Puis au-delà de ces produits culturels, aussi adaptés soient-ils, nous comprendrons comment l'enseignant devra favoriser une formation mettant notamment l'accent sur le "comment apprendre" sur les aspects socio-relationnels, et sur ses stratégies d'intervention et styles pédagogiques (Muska MOSSTON 1986 "Teaching Physical Education".

 Auparavant illustrons notre positionnement sur les modalités et acquisitions de techniques.

 

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 Dans un article de la revue EPS "Kung-Fu, roucoulettes et autres vols de ballon en handball" Maurice PORTES, ,fait remarquer que ces réponses ne sont pas la traduction de comportements mimétiques (les roucoulettes de Jackson RICHARDSON Star Mondiale). Elles ont un sens certes culturel pour l'élève mais elles traduisent surtout un comportement ou un produit adapté au problème initial posé à l'élève : battre le gardien de but et pour cela le contourner en lançant le ballon côté de sa jambe et appui, ce qui au niveau scolaire équivaut à l'impossibilité pour le gardien de but de réagir.

 Pour acquérir cette technique l'élève devra donc être capable en cycle terminal d'impulser (développement ressources bio-mécaniques), puis surtout de prendre des informations durant l'impulsion selon la logique intégrative visuelle (prônée par MARIOT) terrain, ballon, cible, adversaire (Revue EPS 2000) et enfin d'avoir une dissociation segmentaire inter-trains. L'enseignant pour faire acquérir cette technique en échauffement par deux en lançant la balle pour la récupérer derrière après un seul rebond, puis après une situation de duel (défenseur mains dans le dos pour que le tir ait lieu) en demandant au gardien de lever une jambe et en comparant les réponses justes et efficaces (3 fois sur 5). Enfin dans une situation de référence, avec une défense en deux lignes favorisant le jeu en passe et va ou suit et les tirs seul face au gardien de but (5 joueurs de champ, 3 dans les 9 m,. 2 en dehors).

 Nous avons vu, qu'en respectant la logique de l'activité (affrontement) en jouant sur la structure de la tâche (sa complexité allant croissant voir BEUNARD DERSOIR GAIP Nantes EPS Savoirs Fondamentaux Sports Collectifs) l'enseignant va favoriser une formation motrice de l'élève, alliant des qualités perspectives décisionnelles et biomécaniques.

 

 Quel sens peut être donné à cette acquisition de techniques. Apprendre pour un élève de 5ème en volley-ball, à agir sur la balle pour la renvoyer en manchettes ou passes hautes servira à l'élève pour avoir une utilité lors de parties de beach-volley estivales. Malgré tout ce produit devra être acquis dans une situation 2/2 où dans un premier temps le réceptionneur devra se reconnaître acteur sur la balle, puis se déplacer, se placer et choisir un mode de frappe adapté au type de balle (G. TANGUY Formation FPC Académie Bordeaux).

 Lors de cette situation pour que l'élève acquiert des contenus d'enseignement lui permettant d'atteindre la compétence visée (garder la balle haute dans son camp par une manchette) il lui faudra conformément aux compétences générales, "mettre en relation les informations internes et externes" et "apprécier et adapter des procédures se basant sur la connaissance du résultat".

 En nous appuyant sur les travaux de SCHIMDT 1985 et de son programme moteur généralisé, l'acquisition de cette manchette se fera progressivement par un affinement au fur et à mesure des répétitions. FAMOSE évoque à ce sujet l'importance des règles de paramétrisation (direction, force, amplitude, durée) de l'action motrice sur la balle, qui seront associées à la connaissance du résultat (balle en face, basse, en arrière), à l'appréciation de la balle (forte, qui flotte) et au ressenti en termes d'informations interoceptives.

 La formation sera optimale si l'élève par un feed back ajouté (élastique tendu renseignant sur la qualité du résultat) et des variations du lancer (près du filet, au loin, lancer "grenade" au service) peut devenir compétent en termes de pouvoirs moteurs.

 Nous insisterons aussi sur le fait que cet apprentissage doit être optimal au sens où l'entendent VIGOTSKI Zone proximale de développement 1985 et Linda ALLAL CARDINET PERRENOUD L'évaluation formative dans une pédagogie différenciée 1970.

 Ainsi pour cette acquisition l'enseignant devra envisager des remédiations (taille du terrain de 2,5 x 5 à 4 x 8, balle en mousse, hauteur du filet etc…)

 Nous avons donc vu que participer à une réelle formation des élèves implique de cibler les besoins, de prévoir un dispositif évolutif selon les réponses et de souligner l'importance du feed back de l'élève ou sur ajouté pour progresser.

 Comment enfin cette approche peut favoriser le développement de toutes les ressources intervenant dans une technique motrice. Prenons le cas d'une élève de 6ème qui selon Marie Christine PERIGNON FPC Reims 1999 (Site Académie Reims Internet) a dépassé les stades "terriens, quadrupèdes, bipèdes inversés" mais ne parvient pas comme le souligne GOIRAND "à se perdre pour se retrouver". Pour atteindre le stade de l'acrobate l'acquisition de la technique du salto avant passe par le développement de ressources affectives pour cet élève là !

 En effet, elle sait tourner autour, avoir un petit moment d'inertie en se regroupant et a des qualités d'exécution motrice dans la norme. Inférant sur ses ressources l'enseignant va donc décider de lui proposer un atelier de prise de conscience de ses possibilités : départ d'un plinth en mousse avec parade de l'enseignant, puis effectuer des roulades puis salto sur des tapis de réception DIMA 2 x 2) entassés après impulsion sur un tremplin à ressort.

 Cet aménagement du milieu lui posera problème dans un premier temps (sauter vers le haut) puis lui permettra en réduisant le nombre avec ajout d'une parade d'expérimenter l'espace aérien comme il est recommandé dans les textes (dimensions aériennes, terrestres et aquatiques des conduites motrices "BO 29 17/08/96 6ème.

 Nous avons donc vu qu'acquérir une technique passe aussi par ce qu'appelle Gilles BUI-XUAN un stade affectif et que l'approche didactique peut permettre par un aménagement du milieu. Mais nous avons aussi noté que cela nécessitait une présence de l'enseignant pour lutter contre les représentations erronées de l'élève et lui permettre de dépasser ce blocage affectif.

 Il reste que former un élève en ne lui donnant que des potentialités nouvelles et en lui permettant d'y voir un intérêt social direct nous semble un peu réducteur à une conception plus élargie de sa formation.

 

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 Comment alors lui permettre de se former plus dans d'autres champs. Les formes de groupement dont parlait déjà DE CORTE 1981 "Schéma de l'action didactique" et la communication induite par celles-ci pourront nous aider pour envisager l'acquisition de techniques comme moyen de formation.

 En sports de combat BARBOT dans une expérience (1986) dans les Bouches du Rhône expérimente un travail par petits groupes où alternent des périodes de combat au sol pour des 6ème (respect de l'intégrité physique et dans les compétences de groupe "au sol amener l'adversaire sur le dos et l'y maintenir") et après 1 minute une discussion sur les options choisies par chacun. Il note que des conflits socio-cognitifs apparaissent (selon DOISE-MUGNY 1981 et PERRET CLERMONT confrontation de points de vue différents).

 Si la technique de renversement passe par la création d'un point fixe et l'application d'une force exerçant un levier de type inter résistant (DURET "Biomécanique pour les STAPS" 1997), ce dispositif va permettre à certains de s'enrichir de la réflexion des autres : passer d'un équilibre quadripode à tripode TABERNA KOUYOS "Enseignement de la lutte" fragilise l'équilibre ou de la nécessité d'agir sur un membre pour augmenter le levier. Une situation mettant en jeu un élève à quatre pattes et un autre à genou à ses côtés pourrait illustrer une mise en œuvre de l'acquisition de techniques de retournement. Après recherche chaque groupe pourrait présenter à la classe ses options.

 Comme le souligne BERBAUM 1996 dossier EPS 61 (Opus cité) "Apprendre comment s'y prendre permet d'acquérir de nouveaux pouvoirs moteurs".

 Le développement des processus passe donc avant le produit et cette démarche vise simultanément à modifier les représentations fonctionnelles (BOUTHIER) des élèves en les invitant à optimiser l'utilisation de leurs ressources (souhaite programmes collège).

 Le développement des ressources cognitives et socio-relationnelles s'envisage donc dans cette mise en œuvre et acquisition d'autant plus qu'elle sollicite la tenue de différents rôles sociaux : arbitres, juges observateur.

 L'élève peut y voir un sens relationnel et le former à coopérer, à demander de l'aide apparaît dans les programmes collèges "compétences générales cycle central" tout comme dans les compétences culturelles du lycée.

 Comment dans ce cadre le métier d'enseignant peut-il s'accorder avec ces perspectives ? Une pédagogie du contrat en relation avec des projets d'acquisition par l'élève nous semble alors incontournable. D'ailleurs les nouveaux textes lycées invitant à donner des connaissances plus particulièrement , des techniques issues de l'action, suite à un guidage de l'enseignant et demandant la réalisation de performances relatives au temps et à l'espace (compétence culturelle 1), en ayant un projet d'acquisition ou d'entraînement (compétence méthodologique 6), s'inscrivent parfaitement dans cette optique.

 Illustrons notre propos, un élève de terminale souhaite comme le souligne le programme, de pair avec un camarade, réaliser son 250 m en effectuant 25 m papillon, 25 dos, 25 brasse et 175 en crawl. Il devra respecter les techniques de nage pour prétendre à la note maximale, et celles des virages.

 Compte tenu des difficultés et enseignement de cette APSA voir "PELAYO-CHOLLEY-MAILLARD-ROZIER" La natation au collège et au lycée 2000 de l'école aux associations l'enseignant sera amené à un modèle d'intervention pédagogique laissant une place importante à l'autonomie. Travail par deux, fiches explicatives, présentation des éducatifs notamment pour le papillon, règlement.

 A notre avis il serait opportun de procéder à la formation de dyades ou triades intégrant ce que LAFFONT appelle la relation dissymétrique 1994. C'est-à-dire qu'un élève tuteur s'occupe d'un tutoré pour lui faciliter l'apprentissage des techniques respiratoires (sous l'aisselle en crawl, en fin de poussée etc…), des formes de trajet moteur, (godilles pour rechercher des masses d'eau stables sur lesquelles s'appuyer), une position hydrodynamique (CHOLLEY 1986 "Apprentissage scientifique de la natation" réduire le maître couple intervenant dans la résistance à l'avancement F = a b V2 étant le coefficient de forme).

 A l'inverse le tutoré pourra renseigner l'élève plus expert sur ses temps de passage, se forger un référentiel visuel etc… Nous voyons là que ces communications élèves/élèves entretenues par la communication professeur/élèves dans une perspectives "d'étayage" selon BRUNER 1983 favorisent la formation de l'élève en matière de solidarité.

 Concernant le projet, l'enseignant essaiera de donner des repères à l'élève pour que celui-ci par lui même puisse se fixer des échéances d'acquisition ex. : 3 à 4 séances pour arriver à onduler et placer la respiration en papillon à la fin de la traction sur des trajets moteur, travailler une planche sous le ventre, après un travail préparatoire par un passage dessous/dessus les lignes d'eau en travers, puis traverser la piscine en long avec appui sur le fond, et ondulations enfin crawl ondulé en rattrapé avec actions simultanées des jambes.

 Concernant une dernière dimension de la formation (nous devons nous limiter à l'illustration de certaines), comment l'acquisition de techniques peut contribuer à la formation, à la sécurité. Volontairement nous ne l'avons pas étudié lors de notre première partie puisque l'objet de l'EPS n'est pas d'enseigner la sécurité mais conformément à la Charte des programme 92 de "faire acquérir des savoirs et connaissances sur le corps favorisant l'attente de compétences évaluables dans l'action".

 La sécurité s'aborde donc à travers des acquisitions techniques même s'il est une technique (Assurage en moulinette en quatre temps).

 Donc plus que le travail de cette technique, incontournable en escalade cependant et non négociable, pour être en accord avec les textes sur la sécurité 1994, c'est plus selon nous dans la tenue de rôles de pareur que la formation s'effectue à l'occasion de l'apprentissage d'un saut par renversement au saut de cheval.

 En cycle terminal le programme exigeant parmi les trois sauts, des passages par l'appui renversé l'enseignant devra mettre en place des dispositifs où dans un premier temps il pourra vérifier les savoirs de l'élève qui l'assisteront puis il pourra leur laisser la responsabilité en étant présent.

Cette formation à la sécurité pourra aussi s'envisager par rapport à une prise de risque mesurée de l'élève au regard de sa propre connaissance et de la connaissance de la difficulté. Une pédagogie d'échange s'appuyant sur la verbalisation de l'élève et sur sa prise de conscience des difficultés. Ainsi une mise en œuvre consistera à faire travailler les élèves sur un mini trampoline après une course d'élan pose des mains sur un plinth en mousse et réception sur des tapis à hauteur.

 Les parades s'effectueront à l'impulsion pour faciliter l'envol par une aide dans la montée des talons et empêcher l'avancée des épaules.

 

 

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Pour conclure notre propos sur l'étude de la participation à la formation de l'élève, de l'acquisition de techniques nous pouvons énoncer les idées suivantes.

Non contrairement au titre de l'ouvrage de René GARASSINO 1991 la technique n'est pas maudite !

En effet nous avons vu que, pour peu qu'elle soit contextualisée, que sa démarche d'acquisition soit active, adaptée à l'obstacle posé par une situation problème, bien ciblée en fonction des besoins des élèves et enfin bien régulée, alors la formation de l'élève y gagnera.

C'est dans la conception précise de la tâche et dans les différentes remédiations prévues par l'enseignant (intégrant des comportements attendus) que réside la participation à une formation motrice, afin que l'acquisition de différentes techniques puisse mobiliser l'éventail des ressources de l'élève.

Au-delà des difficultés de mise œuvre de ces attendus, nous avons pu cerner que la formation d'un élève citoyen s'intégrant dans une société démocratique ne pouvait s'arrêter à cette perspective.

La possibilité offerte à l'enseignant d'EPS d'explorer les champs de la formation à l'autonomie, la solidarité, la responsabilité et la sécurité afin de développer le potentiel des élèves dans ces domaines, via l'acquisition de technique est possible et souhaitable.

Il est alors nécessaire de combiner à la structuration de la tâche, des organisations et des modalités d'intervention allant dans ce sens.

La richesse des APSA support ouvre des perspectives intéressantes quant à leurs problèmes fondamentaux et les comportements qu'elles induisent et nécessitent lors de leur transposition didactique.

Il reste au final que la part prise dans la formation de l'élève lors de l'acquisition de techniques n'est que partielle. La tâche de l'enseignant face à un groupe, au regard de ce qui est en jeu dans la problématique que nous avons énoncée, nous paraît devoir s'étendre aux autres types de problèmes intervenant tels que : l'hétérogénéité, le traitement de l'échec, l'effort etc…

Ils participent eux aussi à la formation complète de l'élève ce qui reste un des enjeux majeurs du professeur d'EPS.

 

 

 


 

 

 

 

 

AGREGATION INTERNE Ecrit I note 8,5/20

(Dissertation)

 

"Etre fort pour être utile" (HEBERT "Code de la force 1914"… "La santé c'est le silence des organes"… "La santé c'est le bien-être physique et moral de l'homme" (définition de l'organisation mondiale de la santé 1946) : voici différents propos traversant le 20ème siècle et abordant le fonctionnement corporel et spirituel de l'homme.

S'il est originellement l'objet de la médecine, il est aussi en relation avec l'éducation physique (EP), devenue institutionnellement éducation physique et sportive en 1967. Celle-ci, en effet, charte des programme (1992), vise à "transmettre des connaissances ou savoirs sur le corps afin d'acquérir des compétences évaluables dans l'action".

Ce concept de santé sera appréhendé en tant que connaissance scientifique et intégrera comme facteur non humain, le forum hybride que constitue l'EP, s'organisant autour de facteur humains tels les scientifiques, les administrateurs et les politiques comme le montre KLEIN (cité par TRAVAILLOT-TABORY 2002 histoire de l'EP : genèse d'une discipline scolaire) lors d'une conférence à l'Institut Universitaire des Maîtres à Pau 2000 (IUFM).

Selon cette perspective, issue de la sociologie de la connaissance (BERGER LUCMAN 1966, reprise par Bruno LATOUR et Michel CALON 1991), il nous faudra étudier l'influence de cette norme, sur une pratique éducative, d'une part, analyser les enjeux sous-jacents aux orientations disciplinaires, et les rapports de force entre les différents acteurs humains d'autre part, et enfin percevoir l'aspect dynamique et évolutif au regard du contexte socio-économique.

Les rapports entre une discipline et un des concepts qui la structure sont-ils exclusifs ou équilibrés, de subordination ou d'interaction, influencés ou instrumentalisés et par qui ? Autant de questions au regard d'une longue période, riche en rebondissements nécessitant de procéder à une périodisation triple. Ainsi nous pourrons formuler des rétrodictions (Paul VEYNE "Comment l'histoire s'écrit 1971" visant à qualifier et analyser les relations durant le 20ème siècle entre l'EP et la Santé.

Notre propos sera donc de montrer que si les rapports EP/Santé ont d'abord été faussés par une carence en matière de connaissance et un contexte pesant de tout son poids sur ceux-ci, la poursuite d'une instrumentalisation de l'EP, associée à une définition plus exhaustive de la santé a contribué à la création de rapports interactifs, débouchant in fine d'un équilibrage du poids des différents acteurs dans une perspective évolutive.

Dans un premier temps, nous analyseront du début du siècle jusqu'à la fin de la seconde guerre mondiale, l'asservissement de la discipline à une conception orientée de la santé du militaire à l'eugénisme.

Puis, nous verrons que l'utilisation et l'instrumentalisation au service du sport, suppliant la nécessité eugénique progressivement, favorisera une prise de conscience de la pratique sur la théorie.

Dans un dernier temps nous analyserons cette interaction dynamique, intégrant la notion temporelle de la santé, respectant le poids d'autres composants de la discipline, et prenant en compte le contexte socio-économique.

 

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 Au début du 20ème siècle, le contexte socio-économique français fait état d'un pays rural où la nécessité d'être en bonne forme physique s'impose. 

 Quelles sont les connaissances sur la santé à cette époque. C'est tout d'abord une vision statique de l'homme qui s'impose. Le Dr LABBE s'appuie sur des données anthropométriques pour vérifier le bon état de l'homme.

 Par la suite, une logique fonctionnelle va s'imposer sous l'impulsion du Dr BOIGEY et du Dr LAGRANGE. Nous pourrions dire que le spiromètre symbolise l'outil mesurant la santé.

 Dernière évolution, les travaux de DEMENY qui visent à évaluer les capacités à travers des tests d'application.

 Dernière évolution, les travaux de DEMENY qui visent à évaluer les capacités à travers des tests d'application.

 Donc nous voyons là une vision parcellaire, même si elle évolue, puisque la santé mentale n'est pas prise en compte.

 De même la santé ne s'envisage pas de la même façon chez la femme (vouée aux travaux de couture et devant être à même de procréer dans les meilleures conditions) et chez l'homme qui doit développer sa force ce qui débouchera plus tard sur l'évaluation du VARF (vitesse, adresse, résistance, force).

 Le contexte socio-économique durant cette période quel est-il ? Jusqu'en 45 où 40% de la population est encore rurale, rien à notre avis n'évolue de façon brutale sur le plan professionnel, malgré l'apparition des congés payés sous le front populaire.

 Par contre cette période voit se succéder, une préparation à la 1ère guerre mondiale, la guerre, la reconstruction. Il nous semble justifié de voir que l'EP a été à ce moment tour à tour utilisée par les militaires, puis pour reconstruire la nation. Ce sont donc les politiques qui ont mandaté l'EP pour répondre à ce besoin. C'est une des caractéristiques de "l'état providence" J. DEFRANCE 1980 "Sport et Pouvoir" d'intervenir de la sorte.

 

 Nous faisons l'hypothèse que durant cette période où les médecins règnent sur l'EP, les acteurs sur le terrain n'avaient pas les connaissances pour, à partir d'une autre conception de la santé, avoir d'autres revendications. Donc, un contrôle médical pour pratiquer l'EP, une évaluation sous leur joug, une main mise sur la formation, succèdent à celle des militaires et d'AMOROS notamment, et une participation à l'effort de la nation, font que l'EP ne s'entrevoit pour l'essentiel que par la santé. Ceci c'est pour former de futurs soldats, des travailleurs pour rebâtir la France, et des "génitrices" voir CLEMENT Sport et Femmes au 20ème siècle.

 Nous avons donc montré que face à une guerre imminente, après celle-ci, avant une seconde et pendant cette seconde, l'état via les militaires puis surtout les médecins, avait instrumenté l'EP pour répondre à des enjeux lui étant extérieurs. Ceci a été possible par une carence dans la définition de la santé et une présence omnipotente au regard des objectifs spécifiques de l'EP. Malgré tout l'apparition d'un sport scolaire "pour accompagner le travail intellectuel" (aboutissant à la création de l'OSSU en 1938) et les premiers congés payés peuvent selon nous être les prémices d'une évolution du concept de santé. C'est en effet seulement en 1946 que ce concept évoluera radicalement (opus cité). Quelles furent les conséquences concrètes ? Peu en effet, compte tenu de l'état de la jeunesse française : en moyenne 10 cm et 10 kg de moins qu'avant la guerre et des valeurs identiques à celles du début du siècle, voir B. DURING "La crise des pédagogies corporelles" 1981.

Dès lors il est logique de voir apparaître les centres de rééducation physique (CRP), compte tenu des 25 000 (conférence G; FERNANDEZ "Evolution de l'EP/évolution système éducatif" PAU IUFM 2002) enfants à problèmes au sortir de la guerre. Le Dr PETAT à la base de ces CRP participera à la diminution de ce nombre (1500 fin 1957). L'éclectisme doux existant alors se justifiait selon nous et le nouveau facteur non humain ne pouvait contre balancer cette nécessité (imaginons que nous soyons en Bosnie quel serait notre objectif majeur actuellement et pourrait-on se passer d'une EP hygiénique ?). Pour conclure avec l'influence de la santé sur l'EP nous voyons dans les I 059c inspirées par SEURIN l'application de cette visée (a-normaux, OSSU, normaux, dispensés sont les quatre groupes nécessitant une adaptation de l'exercice en fonction de leur santé). Il existe toujours une différence filles/garçons puisque dans les années 50 le Dr D'ENCAUSSE interdit le sport de combat, le rugby aux filles.

Pour autant, dans les faits apparaît une pratique sportive caractérisée par l'expression de Jacques DE RETTE "La gymnastique de grand-papa est morte". Nous voyons là un élément traduisant la prise en compte par une activité sociale ludique d'un élément de la santé : le mental.

 

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Cette rupture marque selon nous, malgré l'instrumentalisation au service du sport qui va suivre, le début de nouveaux rapports entre l'EP et la santé.

 La santé dès les années 60 sera en effet marquée par le sceau de la prise en compte de l'esprit. Bien entendu parallèlement à cette prise en compte, des progrès en médecine vont apparaître John BARNARD (greffe du cœur), influence de la pratique physique sur le système cardio-pulmonaire (FARTLEK, circuit training), plus tard l'apparition du stretching.

Mais ce qui nous apparaît plus révélateur, ce sont les travaux sur le corps Michel BERNARD, la psychomotricité PICQ, VAYER, AUCOUTURIER ainsi que ceux issus du groupe Recherche Expression Corporelle qu'animera PUJADE-RENAUD. Associés à l'influence de la psychanalyse qui pèsera de tout son poids à cette époque là (FREUD) travaux de Françoise DOLTO.

 Les productions nouvelles et diversifiées associées à une prise en compte nouvelle des effets néfastes de l'utilisation du sport vont selon nous arguer en faveur du fait que l'EP peut aider à clarifier le concept de santé, en faisant état d'une pratique favorisant l'atteinte d'un but sanitaire. Le but sanitaire se verra plus tard institutionnalisé dans les IO 67 par la prise en compte de "l'individu dans sa totalité".

 Les aspects socio-économiques qui orienteront la discipline EP puis EPS (nouvellement nommée) via des directives politiques Plan Jaxe NERSOG 1960, JO 67, circulaire 6162 privilégiant donc certains acteurs au regard des contraintes.

 Il faut une France conquérante (politique grandeur DE GAULLE) la santé s'incarnant dans un élève dynamique à même de s'adapter aux futures transformations sociétales.

 L'archétype du citoyen à former, devenant plus tard le jeune cadre dynamique jouant au tennis ou la jeune femme pratiquant l'aérobic Véronique et Davina (années 70) tous deux en bonne santé physique et morale.

 Recentrons nous sur les rapports EP/Santé : la discipline fait donc une place à ce concept perçu de façon exhaustive, sans négliger d'autres composants (acculturation, relations sociales etc…) Elle aussi la voie à une santé professionnelle grâce à l'EP utilitaire et professionnelle.

 Nous avons donc essayé de montrer durant cette période, malgré une instrumentalisation de la discipline au service du sport, que celui-ci était perçu avec des limites (WALLON "Un sport adapté à l'enfant fait pour lui " : donc préservant sa santé), que les pratiques en EP pouvaient rendre compte d'une certaine conception de la santé (être total, dynamique) et que les facteurs non humains s'ils n'avaient pas encore une influence prépondérante, étaient en période de gestation. Celle-ci préludera à la construction d'une matrice disciplinaire (Thomas KUHN "Sociologie des disciplines") telle qu'elle existe actuellement et qui donne toute sa part mais rien que sa part au concept de santé.

 

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 Que manquait-il alors à l'EPS dans ses rapports avec la santé par rapport à aujourd'hui?

 Le troisième objectif de l'EPS apparu au collège "Acquérir les connaissances nécessaires à l'organisation et l'entretien de sa vie physique " Programme sixième BO n° 29 17/08/76 et dont parlait déjà PINEAU 1990 Dossier EPS "Didactique de l'EP", est celui là et il intègre en plus du caractère dynamique de la santé, de l'être dans sa totalité l'aspect temporel avec la gestion de la vie physique que l'on retrouvera plus tard dans les programmes lycée BOH56 31/08/2000, HS n°5 30/08/2000.

 Nous ferons l'hypothèse en nous appuyant sur KLEIN (Opus cité) que cette dimension répond à une orientation internationale de l'EP définie à Moscou lors du deuxième MINEPS (regroupement ministres, scientifiques, inspecteurs EPS de plus de 150 pays) et que PINEAU après cette réunion en 1988 intégrera à la santé tout au long de la vie (création groupe pilotage inspection générale, synthèse MULHOUSE avec les GAIP 90)

 Durant cette dernière période quels rapports scientifiques par rapport au concept de santé.

 Nous pensons qu'il est désormais mieux appréhendé par une approche longitudinale à travers le passé, le présent qu'on maîtrise pour un meilleur futur.

 Les différentes études épidémiologiques sur les conditions de vie, les antécédents familiaux obtenus suite à des progrès fulgurants de la médecine, permettent une approche plus rationnelle.

 Par ailleurs des constats alarmants sont faits : 1/3 d'adultes en surcharge pondérale, 1/5 d'enfants proches de l'obésité, la première cause de mortalité est due à des maladies cardio-vasculaires ; le stress, l'alcool, la nutrition sont causes de décès prématurés.

 Le facteur non humain joue donc son rôle en orientant les contenus disciplinaires.

 Au niveau des compétences générales du collège nous notons par rapport à soi en 6ème "Attention et vigilance par rapport aux évènements, connaître risques liés au matériel ; "Maîtriser ses émotions" ; En 5ème, 4ème pour le cycle central "Adapter et réguler ses ressources en fonction des actions à entreprendre" ; en relation avec les autres "Respect des autres en 6ème", "demander aide, parade" ; en relation avec d'autres disciplines en 6ème "Identifier les effets de la motricité et de l'effort sur soi" d’Identifier ressources et contraintes milieu", en 5ème "Connaître règles hygiène de vie).

 Ceci se retrouve au lycée notamment dans les compétences culturelles "Savoir s'engager lucidement dans l'action", "Appliquer les effets de l'activité sur le corps".

 Nous insisterons cependant sur les visées de l'EPS au lycée qui recherchent après le texte 1999 "Développement personnel", "Equilibre personnel" dans le BO HS n°6 2000 "Un développement personnel et un équilibre personnel associés à la réalisation de soi".

 Sachant que "l'EPS doit former un citoyen cultivé, lucide, attentif aux relations sociales, acteur et critique de l'évolution des AP tout au long de sa vie", il nous apparaît que la nouvelle conception de la santé s'opérationnalise dans les textes actuels sans prendre une part trop importante puisque, que ce soit en collège avec les compétences spécifiques ou de groupes ou en lycée avec les quatre types de connaissances et les neuf compétences culturelles et méthodologiques un certain équilibre est trouvé.

 L'analyse des conditions socioéconomiques nous fournit-elle de plus amples informations sur les rapports EP/Santé ?

 Durant cette période qui correspond à une massification de l'entrée dans le système éducatif (réformes BERTHIUN 1959, FOUCHET 1963, Loi HABY 1975) est apparue une hétérogénéïté des publics et de leurs conditions socio-culturelles.

L'état a mandaté l'école pour suppléer à un phénomène nouveau qui est apparu : le déficit éducatif parental.

Les missions du professeur 1997 (instruire, éduquer, former) peuvent éventuellement à cet égard représenter une conséquence contextuelle et les modalités pédagogiques particulières des outils pour donner aux personnes défavorisées les moyens de comprendre la santé pour mieux la préserver.

Il reste que si les implications directes du contexte n'ont pas eu de réelle influence sur l'EPS en matière de santé, notre perception du fonctionnement sociétal nous amène à penser, que la société propose, fait agir l'homme et que celui-ci subit. Peut-être faudrait-il à l'instar des courants marxistes proposer de partir de l'humain pour le respecter dans sa santé et non pas la préserver après lui avoir obligé certains comportements.

L'aspect critique, proposé actuellement pourrait s'envisager dans cette perspective de former un futur citoyen défendant sa santé dans la future société.

 

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 Au terme de cet exposé que nous avons centré sur les relations entre un facteur non humain (la santé), appartenant à un champ extérieur à l'EP, mais composant d'un ensemble hybride, l'intégrant et l'utilisant, et ce "tout" que pouvons-nous retenir ?

Nous avons globalement perçu que ces rapports n'existaient pas de fait. Ils relèvent de luttes d'influence, et sont révélateurs d'enjeux sous-jacents qui orientent les choix disciplinaires.

Cette construction sociale de la réalité, s'appuyant sur une connaissance évolutive (nous invitant à la prudence, quant aux perspectives du 21ème siècle) de la santé et sur un contexte socio-économique déterminant, selon le siècle nous a permis de discerner 3 périodes.

Nous avons vu que le politique profitant d'une définition incomplète de la santé et compte tenu d'impératifs sociaux économiques vitaux, a pris une part démesurée dans le forum hybride de l'EP. Ce faisant ce concept a entraîné des rapports de soumission orientant des contenus partisans et ne prenant pas en compte l'individu dans sa globalité. Nous avons pu noté qu'une rupture dans l'appréhension de ce concept (connaissance plus exhaustive), n'a cependant pas permis de sensiblement modifier les rapports EP/Santé, tant il est vrai que le contexte empêchait cette évolution.

C'est par une pratique, fruit d'une instrumentation nouvelle qu'est venu le passage à une intéraction entre une discipline et une de ses bases scientifiques. Ceci a aussi été permis par une intense production humaine dans le domaine scientifique mettant fin à une conception duelle de l'homme.

Enfin, dans un passé récent, nous avons pu montrer l'influence d'une réflexion mondiale, sur des rapports EP/Santé intégrant plus et mieux la temporalité.

Parallèlement une réflexion disciplinaire a, selon nous, donné une juste place en termes d'équilibre à ce facteur non humain. Les soucis s'étant peut-être plus déplacés vers le pôle spirituel sans rétablir de dualités et sans négliger le pôle corporel (dont nous connaissons les tenants et aboutissants d'un point de vue sanitaire), l'EP se pose donc les questions inhérentes à l'influence négative de l'un sur l'autre.

Comme le souligne F. DUBET "L'éducation consistant à faire correspondre une culture scolaire à une culture propre à l'élève" c'est donc cette recherche d'une santé à tous les âges, intégrant toutes les dimensions, qui oriente désormais la discipline.

Si les textes, nous l'avons vu, fruit des propositions d'acteurs humains administratifs, semblent répondre à cette préoccupation, il faudra aux acteurs de la profession en dialogue avec les élèves, tenir un rôle important afin que dans l'avenir, ce ne soit pas toujours la santé qui soit préservée par rapport aux activités socio-économiques.

Gageons que nous saurons, tous ensemble faire en sorte qu'elle soit, puisqu'elle est la condition sine qua non à un bon fonctionnement individuel, à la base de l'évolution disciplinaire en respectant (mais en la tenant) sa place pour former de futurs citoyens qui en mesurent toute l'importance.

 

 

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Hervé DUBERTRAND
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